Par Franck OLIVIER – Conseiller Municipal à SAGY de 2014 à 2020
Citoyen de proposition

Le ru de Saillancourt (deuxième partie) : « Chacun des territoires doit définir ses leviers d’adaptation par rapport à l’évolution du climat et à ses conséquences » R. Dantec

Cet article fait suite à la publication : https://www.regard-sur-sagy.fr/le-ru-de-saillancourt-1ere-partie/ en décembre 2020

Après une période de sécheresse et la baisse du niveau des nappes phréatiques, de nombreuses régions ont subi des précipitations importantes conduisant à des inondations catastrophiques.

En novembre 2023, dans le Pas de Calais, les rues de nombreuses communes se sont transformées en torrents, provoquant d’importants dégâts jusqu’à l’intérieur des habitations.

Afin de prévenir les dégâts causés par ces aléas climatiques, de plus en plus d’acteurs politiques pointent la nécessité de rénover et de redimensionner les réseaux hydrauliques dans les zones sensibles et urbanisées.

Mr Ronan Dantec, co-auteur du Rapport d’information « Adapter la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050 : urgence déclarée », sénateur de la Loire-Atlantique, vice-président de la commission de l’Aménagement du territoire et du Développement durable, souligne le  rôle majeur des PCAET, Plans Climat-Air-Energie Territoriaux :

« Il faut comprendre qu’une des bases des effets du réchauffement climatique repose sur le fait que des événements qui étaient peu probables et peu prévisibles sont en train de devenir beaucoup plus probables.

Ces crues, qui ne s’étaient jamais produites, avec un niveau de précipitations extraordinaire, vont donc se renouveler. S’y adapter va représenter un travail incroyable, et c’est la décision politique qui est devant nous.

De manière simple, passer d’une crue centennale à une crue décennale a des conséquences considérables sur les documents d’urbanisme. Il faut donc pour commencer adapter tous les documents d’urbanisme, de prévention des risques et d’intervention, à ces événements qui vont devenir beaucoup plus fréquents. Concrètement, des zones sont en train de devenir impropres à la construction et d’autres vont devoir se doter de mécanismes à activer en cas de catastrophe…

Tous les grands organismes qui créent du consensus, le Conseil économique social et environnemental, le Conseil national de la transition écologique sont saisis pour nous dire ce que vont donner ces + 4 °C et agir au mieux, tout comme Météo-France, qui planche dessus en termes techniques. Il faut qu’on vérifie les conséquences principales et ensuite les conséquences sur le terrain, qui vont être extrêmement diverses selon les territoires.

À mon sens, l’échelon clé est celui de l’intercommunalité. Les plans climat-air-énergie territoriaux sont d’ailleurs obligatoires à cette échelle. Les prochaines années doivent être celles du diagnostic de vulnérabilité des territoires, car les solutions dépendent d’eux.

Chacun des territoires doit définir ses leviers d’adaptation par rapport à l’évolution du climat et à ses conséquences. Il sera aussi possible d’opter pour le curage de fossés et effectuer des travaux de génie civil afin que l’eau ne déborde pas. Le premier enjeu est qu’aucun territoire ne se masque le risque. »

(17/11/2023 propos recueillis par Lou Roméo – Le Point)

Je crois qu’on a vraiment un changement d’attitude des décideurs, des élus, des responsables économiques sur le fait que l’adaptation devient une véritable urgence” (M. Ronan Dantec).

————————————————————–

Qu’en est-il sur notre commune ?

Tous les documents cités dans cet article sont publics, c’est à dire libres de consultation en mairie de Sagy ou sinon à la Direction départementale des territoires du Val d’Oise / DDT Val d’Oise – Service de l’Agriculture de la Forêt et de l’Environnement / SAFE.

Le rapport intitulé « Schéma d’aménagement et de gestion des eaux du bassin versant de l’Aubette de Meulan » (Rapport de Phase 3 – avril 2008) localise les risques et liste les aménagements hydrauliques de lutte contre les inondations sur le territoire de la commune de Sagy.

 

Sur ce document transmis au « Syndicat Intercommunal pour l’Aménagement de l’Aubette de Meulan », la partie amont de Saillancourt (rue de la Vallée en venant de Menucourt) est classée en zone à risque « inondations de maisons » en raison des débits de pointe des sous-bassins versants, en particulier le n°6 d’une surface de 188 hectares, pour lequel, avec une pluie de durée intense de 3 heures, le débit peut atteindre 3,6 m3/s.

Dans la traversée de Saillancourt, le busage du ru est long de 900 m et sa pente moyenne est de 2,2 %. Selon les éléments du schéma directeur d’assainissement, le ru de Saillancourt ne pourrait évacuer que 1,5 m3/s au maximum, alors que les débits cumulés générés par les sous bassins versant de la ravine des sablons (rive droite confluent en amont du busage / sous-bassin n°6), des taillettes et des garennes (rive gauche / sous-bassin n°4) ont été estimés à plus de 5 m3/s pour un épisode 3 heures et un temps de retour de 20 ans (durée moyenne au cours de laquelle, statistiquement un événement d’une même intensité se reproduit).

Ainsi pour évacuer les débits cumulés à l’entrée de Saillancourt, la modélisation de 2008 préconisait un diamètre du busage de 1,5 m  alors que son diamètre actuel est de 0,7 m.

En 2008 le rédacteur du rapport a mentionné l’absence de volonté de redimensionner le réseau hydraulique dans cette zone sensible : « Dans le cas où les travaux de redimensionnement du busage ne seront pas réalisés, ce qui semble être la volonté politique locale ».

Si l’on suit les conseils préconisés par le rapport d’information « Adapter la France aux dérèglements climatiques à l’horizon 2050 : urgence déclarée », il faudrait actualiser l’étude, voire « effectuer des travaux de génie civil afin que l’eau ne déborde pas ».

Sur le plan cadastral “Napoléonien, le ru coule librement dans une zone correspondant à des marèches (en amont de la rue de la Goupillère) puis dans une plaine d’inondation (en aval), qui permet aux eaux de ruissellement de s’épandre et s’accumuler instantanément en périodes orageuses.

L’urbanisation des années 70 a entraîné  l’enfouissement du ru « dans des propriétés privées » (cf. rapport page 46) et risque d’être lourde de conséquences lors d’évènements météorologiques amplifiés par le dérèglement climatique en cours.

Extrait du rapport public « Pétition contre les eaux de ruissellement du bassin versant en amont de la ZAC d’Alçon à Menucourt » (15 juillet 2011).

A propos de l’orage et de l’inondation du mardi 8 juillet 1975

 

 

————————————————-

Cartes postales sonores d’une dizaine de minutes témoignant de l’épisode orageux du 8 juillet 1975, extraite d’un enregistrement de deux heures réalisé le 30 juillet 2013 dans lequel M. Henri Pétraszko raconte “la mémoire de Saillancourt” : le tacot, les sources, la guerre, … et, entre-autres, ce « fameux » épisode orageux du 8 juillet 1975 (Interview : J.P. Herbin, prise de son D. Renaut) .

 

 

————————————————-

 Météorologie 

Un orage stationnaire est capable de déverser de grandes quantités de précipitations au même endroit pendant plusieurs heures et se forme comme un orage classique lors de la rencontre d’un air chaud avec un air froid mais bloqué par un vent contraire.

L’orage stationnaire a la caractéristique de s’auto-alimenter sur place : les pluies forment de l’humidité qui s’évapore, et cette évaporation contribue à alimenter le dynamisme de l’orage.

Si le système orageux est particulièrement puissant, et que les conditions météo le contraignent à rester bloqué sur place plusieurs heures, l’orage stationnaire peut mener à des conséquences catastrophiques avec des précipitations provoquant des inondations.

Visuellement, l’orage stationnaire culmine à une dizaine de kilomètres d’altitude avec une enclume très étalée au-dessus du cumulonimbus.

Il est difficile de prévoir la formation d’un orage stationnaire sur une zone précise, mais les services météo sont capables d’émettre une alerte quelques heures avant (voire un jour avant) pour un « risque d’orage stationnaire » plus ou moins violent à l’échelle d’un département.

 

Jean-Paul HERBIN – SAILLANCOURT – le 5 avril 2024

Commentaires fermés.

Archives